carnet de voyage
Roumanie & Moldavie
AOÛT & SEPTEMBRE 2018
Voici deux destinations peu communes pour des vacances estivales ! Et pourtant… Les pays de l’Est ont toujours eu un attrait particulier, leurs histoires sont riches et bouleversées. Bienvenue donc en Roumanie et Moldavie. Deux pays aux identités culturelles hybrides et multiples, un patrimoine et des traditions très présentes, c’est ce que je vous propose de découvrir dans ce carnet de voyage à travers 3 épisodes de vlog.
3000 km en 15 jours avec Xavier et Gabriel
Point de départ de notre voyage à travers la Roumanie et la Moldavie, Constanța est le plus gros port du pays. Basée sur la Mer Noire, il s’agit de la deuxième ville du pays par sa population et son importance économique.
Sur le littoral, le casino, très 19ème dans le style est abandonné. La ville se concentre autour d’un axe vivant et commerçant, avec de nombreuses églises et mosquées, influencées par son ère ottomane.
Face au Lac Sinoe qui borde la Mer Noire, Histria est un ancien comptoir grec qui remonte au 7ème siècle avant J-C. Il remet en mémoire l’importance de cette mer dans les commerces antiques, à travers un site archéologique impressionnant par sa dimension et les fondations de ses bâtiments.
Ici finit le plus long fleuve d’Europe avec ces 2 850 km. A travers un delta à trois branches, ce fleuve, vital pour les économies européennes, la dernière frontière sauvage d’Europe dans ses derniers kilomètres.
Malmené par l’agriculture intensive, le delta est aujourd’hui classé à l’UNESCO, et fait partie des réserves de biosphères qui servent à étudier l’évolution des espèces. Cette zone est le royaume des Pélicans, et de 250 autres espèces d’oiseaux qui y passent pendant les migrations. Nous sommes pile entre le pôle et l’équateur, sur 7 routes de migrations.
Proposée par notre hôte, la balade en barque dans le delta est THE activité touristique du delta. Et la seule.
Nous sommes dans la région la plus pauvre de Roumanie, l’exode rural est massif, et seul le tourisme dans le delta fait vivre les villages environnants. Et c’est peu dire. Notre conducteur de barque a travaillé 25 ans en Italie pour se payer une maison et une barque.
A travers les canaux et les lacs, nous déambulons dans une petite partie du Delta. La population des oiseaux impressionne par son nombre et sa diversité. Nous sommes chez eux et nous ne faisons que passer…
Grande ville à la jointure des 3 bras du Delta, elle est le grand point de départ pour desservir les villages de cette zone, uniquement accessibles en bateau.
Tulcea, c’est aussi une ville marquée par le passé communiste et un grand chantier naval.
Pour rejoindre Galați, nous prenons le bac. Cette grande ville offre peu d’intérêt touristique. D’ailleurs les personnes qu’on croise nous demandent ce que des Français font ici. On dit qu’on va en Moldavie, ils nous avouent qu’eux même n’y sont jamais allés.
Seule une belle église du 17eme surplombe le Danube, un peu perdue dans ces ensembles construits sous la dictature.
Pour rentrer en Moldavie, on franchit une frontière à l’ancienne. Un poste de douane, une file d’attente, des passeports. On oublie ce que ça fait à l’époque de Shenguen et de l’avion de tourisme.
La République de Moldavie est un des pays les plus méconnus d’Europe. Parmi les plus pauvres également. Ancienne république soviétique, elle partage la culture et la langue de la Roumanie. Seule l’histoire crée la séparation entre ces deux nations très semblables. D’ailleurs, la Moldavie à proprement parler est un région plus vaste, coupée en deux par la frontière roumano-moldave. Il existe donc une région « Moldavie » en Roumanie.
Pays vallonné, il est riche de ses vignobles et d’un vin de réputation, où les grands de ce monde ont établi leurs caves.
La Moldavie compte deux régions autonomes : La Gagaouzie et la Transnistrie.
Cette dernière, sécessionniste échappe au contrôle de la République et est fortement soutenue par Moscou dans sa stratégie d’encerclement de l’Ukraine.
La seconde, plus petite et éparse, a pour capitale Comrat. Ville modeste, industrielle, elle ne se démarque que par sa cathédrale, jaune vif dans un univers très grisonnant.
Capitale de la République de Moldavie, c’est aussi la ville la plus vivante et dynamique que nous ayons vue.
Ici, on trouve des marchés, des terrasses, des bars et des restaurants. C’est plus rare dans le reste du pays.
Très inspirée par la période soviétique dans son architecture et son urbanisme, Chișinău dispose de très grands axes routiers, d’immeubles monumentaux et de parcs à la gloire des armées soviétiques.
La ville se transforme petit à petit, elle est très pro-européenne avec des drapeaux étoilés partout alors qu’elle ne fait pas partie de l’UE. C’est aussi une ville riche en parcs et bois de grandes tailles, qui se veut être une capitale verte de l’Europe.
C’est un monastère posé sur la crête d’un méandre de rivière. Une photo de carte postale pour ce monastère orthodoxe.
Retour en Roumanie pour la suite et fin du voyage.
Nous voici en Bucovine. La spécialité du coin ? Les monastères orthodoxes peints ! Il y en a des dizaines, pendant le règne d’un seul voïvode (sorte de seigneur local), selon un cycle désormais connu. Les plus beaux monastères sont dans un état de conservation exceptionnel, dans des enceintes fortifiées et toujours actifs aujourd’hui. On parle d’école moldave, car la Bucovine fait partie de la région roumaine de Moldavie.
Il faut imaginer ce que ça pouvait être pour l’époque. Construits et peints entre le 15ème et 17ème siècle, à l’extérieur comme à l’intérieur, ces monastères sont de véritables BD de l’histoire biblique. Leurs couleurs sont encore vives, les traits fins.
A l’intérieur, interdit de filmer ou de prendre des photos selon le rite orthodoxe. Mais tout est savamment calculé pour que les peintures épousent la forme de l’église, pour que le soleil éclaire telle peinture à telle heure du jour, et celle-ci plus tard.
Bref, un émerveillement pour nos yeux.
Eglise modeste par ses proportions, Pătrăuți est sûrement l’étalon des monastères de Bucovine. C’est la plus ancienne et probablement la première à avoir été peinte à l’intérieur, et à inspirer toute la série qui suit.
Gardée en permanence par un frère qui fait la visite dans de multiples langues, tous les jours.
De Pătrăuți, on peut rejoindre Dragomirna par une balade en forêt, verdoyante et rafraichissante.
Dommage pour nous, l’église de Dragomirna était en travaux lors de notre passage, elle est unique par ses extérieurs finement sculptés.
On l’appelle la Chapelle Sixtine de l’Orient, dominée par la couleur bleue. La clarté de ses couleurs étonne, la fresque la plus impressionnante se trouvent à l’arrière de l’église et symbolise le jugement dernier.
Probablement la première église à avoir été peinte à l’extérieur. Ici la dominante de couleur est rouge.
De son enceinte fortifiée, il ne reste qu’une tour clocher.
Point commun avec toutes les églises de ces monastères : un toit-carapace enveloppant et protégeant les fresques, et une partie nord plus dégradée en conservation, car la météo est plus rude l’hiver.
La dernière église du cycle de peinture du règne de Petruș Rareș, dominée par la couleur verte.
Sucevița est au fond d’une vallée dans les Carpates. Ici, l’église a des proportions plus élancées, avec une forteresse plus large. L’ensemble a fière allure ! Il s’agit de l’ensemble iconographique le plus riche de tous les monuments moldaves.
Derniere étape de Bucovine, après avoir passé un col des Carpates, on retrouve le plan type de ces monastères : les murailles, les peintures et les thématiques sur les églises.
Particularité de Moldovița, c’est l’exo-narthex, sorte de hall d’entrée avant l’église, finement conçu.
Le Maramureș est la région la plus isolée et la plus préservée de Roumanie. Ici, la période communiste a eu moins de prise sur les traditions et les constructions.
Il s’agit aussi d’une des régions les plus pauvres du pays.
La spécialité du coin, ce sont les églises en bois, souvent du 17ème siècle. Impressionnantes par leurs dimensions, et leur élancement, tout ça rien qu’en bois !
Pour passer de la Bucovine au Maramureș, on passe le Col de Prislop à 1413m d’altitude.
Première étape du Maramureș, et déjà un bel exemple entre deux époques.
Une des rares églises où nous avons pu rentrer. Tenue par une mamie sans âge qui guette les voitures de la fenêtre de sa maison. Elle nous confie les clés à l’entrée du chemin, nous avons le temps de visiter l’église avant qu’elle n’arrive, nous parlant en roumain comme si nous comprenions. Touchant.
Encore un exemple de deux salles, deux ambiances. L’église de Botiza a été construite en 1699, mais a changé de village en 1899. Pratique, les églises en bois !
Classée à l’UNESCO, cette église est classiquement au milieu de son cimetière. Elle dispose également d’une dépendance couverte.
C’est dans ce genre de situation qu’on regrette de ne plus avoir de batterie dans son appareil photo.
Bârsana a un monastère tout neuf ! Construit dans la tradition et le style local, mais dans des dimensions modernes, il impressionne par son atmosphère sereine. Le monastère d’origine a été détruit pendant la période communiste, seule l’église a été conservée et déménagée dans le centre du village.
Il a donc été reconstruit et accueille des personnes de passage.
Dans une ancienne prison du régime communisme se trouve le Mémorial des victimes de la résistance et du communisme.
Seul musée traitant de cette période en Roumanie, l’ambiance est lourde. On passe de cellule en cellule pour découvrir les conditions de détention et la privation des libertés par les régimes communistes.
En sortant, on longe un chemin qui s’enfonce dans le sol jusqu’à une chapelle. Sur les murs, les noms des victimes.
A Săpânța, on aime le cimetière. Rare n’est-ce pas ? Dans cette ville à 1km de l’Ukraine, le cimetière est donc… joyeux ! Et donc touristique.
Et ça, on le doit à un homme, qui un jour a décidé de sculpter dans le bois les pierres tombales (qui portent, du coup, assez mal leurs noms), de les peindre dans des couleurs vives.
Pour chacune, elle représente le défunt, en tenue traditionnelle, dans son métier. Une description accompagnée d’une touche d’humour est également posée en épitaphe.
Depuis, la tradition se perpétue, et l’homme à l’origine de cette idée a sa tombe… joyeuse !
Dernière église en bois de notre voyage, également classée à l’UNESCO.
5ème ville de Roumanie, Cluj est notamment connue en France pour sa fac de médecine francophone. La meilleure du pays, beaucoup d’Européens viennent se former ici car les conditions d’accès sont plus faciles.
Cluj, à l’origine, a vu Napoca venir s’ajouter à son nom dans un esprit purement nationaliste roumain. Ville hybride, elle représente plusieurs influences architecturales, avec beaucoup d’immeubles austro-hongrois.
Nous y restons une soirée.
A l’ouest de la Transylvanie, le Parc naturel Apusenii. Lieu idéal pour des randonnées en moyenne montagne, en dehors de la modernité. Ici, tout est encore à l’ancienne, le temps parait s’être arrêté. Il se dit même que certaines personnes ne descendent jamais en vallée, car l’organisation de ses hameaux est autosuffisante.
Dispersés mais nombreux, ils sont encore habités, et des jeunes proposent même des étapes et le gîte pour des randonnées au long cour.
Cité fortifiée, très inspirée des plans vaubaniens, nous sentons ici un changements d’atmosphère. Nous arrivons dans une région à la culture plus urbaine, différente de nos dernières étapes.
Ville transylvaine, Sibiu ne renie pas ses origines saxonnes. Sur la place centrale, on se croirait dans une ville typiquement allemande.
Ici, une importante population saxonne de 100 000 habitants parlant l’allemand vivait depuis la fondation de la ville, jusqu’à ce que le dictateur Nicolae Ceaușescu décide une roumanisation de la culture, et envoya tout le monde en camp de travaux forcés.
La ville est aujourd’hui très piétonne, et ne manque pas d’une charme très saxon.
Dernière série de ce voyage, les citadelles saxonnes de Transylvanie. Certaines, également classées à l’UNESCO sont de vraies exemples de défenses d’une époque troublées par les conflits.
Une importante population saxonne parlant allemand s’est installé en Transylvanie. Pour chaque village, une organisation très précise, avec une église entourée de rempart. Lors d’une attaque, tout le monde se réfugiait dans l’enceinte qui entoure l’église. C’est aussi ici qu’on stocke la nourriture pour l’année, sous clé.
Première citadelle de campagne de notre série.
Deuxième citadelle de campagne de notre série.
C’est dommage d’arrivée 3 minutes avant la fermeture. On aura fait le tour, mais Biertan restera une vue de l’exterieur pour nous.
Cette citadelle est classée à l’UNESCO.
Etape de choix dans la traversée de Transylvanie, Sighișoara est une ville qui a du charme. Ville du père de Vlad Dracul, qui inspira Dracula, c’est une forteresse impressionnante de génie militaire. Colorées, ces petites rues invitent à la visite.
Dernière étape de notre série de citadelles saxonnes, et sûrement la plus authentique, Vișcri se mérite. Aucune route bitumée n’arrive dans ce village. Ça n’empêche pas des bus touristiques d’y venir.
La citadelle, classée à l’UNESCO, se visite, elle est gardée par une authentique saxonne qui s’adresse à nous en allemand.
Nommée Weisskirche en allemand, église blanche. Au regard des photos, on comprend pourquoi.
C’est LE site touristique de Roumanie. On l’appelle le château de Dracula.
Dracula est un personnage de fiction inspiré de Vlad Dracul qui a régné sur la région, sous le nom de Vlad l’Empaleur. Le programme politique est dans le nom.
Vlad a en fait été éduqué loin de chez lui, dans une tribu qui pratiquait l’empalement pour régner. Revenant régner dans le coin, les gens furent surpris par ses coutumes. Et inspira l’auteur de Dracula.
Le rapport avec le château me direz-vous ? Faible. Vlad n’y a jamais mis les pieds.
Il fut aménagé avec goût par la Reine Marie de Roumanie, qui en fit une résidence secondaire.
Troisième ville de Roumanie, Brașov est une ville à plusieurs visages.
Le vieux centre, niché dans un creux de montagne, mérite le détour.
La ville s’est progressivement étendue dans la plaine, faisant le tour du relief, pour devenir ouvrière et financière.
Elle fut un centre de contestation durement réprimé contre le régime communiste.
Elle porte le nom d’un sommet des Carpates. Făgăraș dispose d’un fort de défense en brique, inspiré de Vauban, qui servit longtemps de prison politique.
C’est l’une des dix plus belles routes du monde.
Transfăgărașan fait 90km, et culmine à 2 020m d’altitude. Une nouvelle liaison nord-sud commandé par le dictateur Nicolae Ceaușescu pour contrer une éventuelle invasion de l’URSS après l’intervention de chars soviétiques en Tchécoslovaquie.
Titanesque, incluant la construction d’un barrage, le chantier fut coûteux en moyens et en vies humaines.
Aujourd’hui la route est prisée des touristes, et des amateurs de routes tortueuses pour leurs bolides. N’espérez pas une seule ligne droite, les lacéts se comptent par dizaine.
Capitale du pays, immanquable visite.
Ville qui monte dans les villes des fêtes européennes, Bucarest est multiple, entre centre-ville historique, quartiers résidentiels, et quartiers monumentaux de la période communiste.
Balade dans les rues du vieux centre de Bucarest
C’est l’un des visages de la capitale et de la Roumanie, et en même temps un triste symbole.
Délire architectural du dernier dictateur Nicolae Ceaușescu, le Palais du Parlement, à la base Maison du Peuple, est monumental en tout point : 350 000m2 de surface, 12 étages et 4 sous-sols, 270m sur 230m, haut de 86m, un quartier entier rasé et 70 000 personnes déplacées.
C’est le premier bâtiment en pierre du monde, et le second administratif par sa taille. Sa construction représentait jusqu’à 40% du PIB roumain. Une ruine.
Beaucoup de fenêtres mais pas de portes, l’accès devait se faire uniquement par les souterrains en voiture. Il dispose même d’un stade en sous-sol.
A la chute du régime, le palais n’est pas fini. Les gouvernements qui ont succédé n’ont pas eu de choix que de le continuer, tellement le travail était avancé. Aujourd’hui, il n’est toujours pas fini, une partie des ailes sont désertes, le travail continue.
Il héberge le Parlement, le Sénat, deux musées, sans arriver à remplir le bâtiment.
Spécial dédi à Gomar, qui élève la langue française encore plus haut sur ce blog, billet après billet !
Avion depuis Paris (1,58t)
3 060 km de voiture sur place (0,72t)
soit
ce que la Terre peut supporter par personne par an pour stopper l’accroissement de l’effet de serre.
Source de calcul : Fondation Good Planet
Très beau reportage qui ravive des souvenirs d’un voyage effectué dans les années 80, sous la dictature de Ceaucescu. En Renault 4, depuis Clermont, une autre époque !
Les monastères peints eux n’ont pas changé, magnifiques! Merci Xavier.